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Blogueur de voyage : un véritable métier

Dernière mise à jour : 14 avr. 2021

1/4 - Blogueurs, influenceurs, journalistes de voyage & destinations : l'indispensable (r)évolution

Stratégie de communication digitale dans le secteur du tourisme. Qu'est-ce qu'un blogueur de voyage, quels sont les pièges et les défis du marketing d'influence dans le secteur du tourisme?

Fort de son indépendance éditoriale, de ses compétences multidisciplinaires et de sa présence sur les réseaux sociaux, le blogueur de voyage a bouleversé l'univers médiatique traditionnel; il est également devenu, en quelques années, un acteur incontournable du développement économique des régions et de la stratégie de communication des destinations touristiques, un influenceur.


Mais qui dit économie, stratégie et influence, dit aussi argent, concurrence, jalousie et supercheries. Tout n'est pas rose dans la jungle de ce métier qui fait rêver, ni dans l'univers des médias traditionnels d'ailleurs. Pour assurer sa pérennité, le secteur doit nécessairement s'assainir et se réinventer.


En outre, une promotion touristique transparente, saine, efficace et responsable ne peut s'effectuer que dans le cadre de partenariats véritables avec les destinations . Ceci demande non seulement une réelle prise de conscience de la part de tous les acteurs concernés mais aussi, pour certains, des aménagements non négligeables de leur politique.


Par ailleurs, notre société est confrontée à des défis majeurs. Qu'il s'agisse d'économie, de développement, d'intelligence artificielle ou de climat, les blogueurs/journalistes de voyage ont leur rôle à jouer et leurs responsabilités à prendre.


Sans doute ce dossier, composé de 4 volets, ne plaira-t-il pas à tout le monde : il pose en effet un regard critique sur le marketing d'influence lié au tourisme et sur ses différents acteurs. Mais au-delà de bousculer un certain nombre d'idées reçues et de rappeler ou dévoiler une réalité économique encore largement méconnue du grand public, il propose aussi de nombreuses solutions et pistes de réflexion.  


En d'autres termes, il se veut avant tout comme un outil d'information à l'usage des voyageurs mais aussi une source de développement, de discussion et d'approfondissement à l'intention des blogueurs, journalistes de voyage, relations presse et destinations.


Car il appartient à tous et à chacun d'entre nous de contribuer - ou non - à un monde plus transparent, plus authentique, plus juste et responsable, au bénéfice du plus grand nombre. Puisse cet article rencontrer un écho positif maximal.


Sommaire, en vidéo





Avant-propos : Légitimité, liberté d'expression et limites


Avant toute chose, suis-je légitime dans ma démarche? En effet, dans la société actuelle où tout le monde se permet de donner son avis sur tout et n'importe quoi, sans parfois disposer des informations indispensables, qui suis-je moi, pour  expliquer le métier de blogueur de voyage et en révéler les failles?


Qui suis-je encore pour critiquer les dessous de la promotion touristique et l'opacité de certains médias? Qui suis-je enfin, pour mettre les blogueurs, influenceurs, journalistes de voyage  et destinations devant leurs responsabilités sociales, économiques et climatiques? 


Premièrement, à quarante-huit ans, ma formation économique, mes connaissances en droit et en gestion - publique, notamment - de même que mon expérience, tant privée que professionnelle, me permettent d'envisager les choses sinon dans leur intégralité, tout au moins dans leur ensemble et ce, avec un nécessaire recul et une certaine lucidité.


Deuxièmement, après bientôt 2,5 années de blogging et des heures passées à l'école de la débrouille, après plusieurs salons professionnels et voyages de presse, j'estime avoir déjà acquis les connaissances suffisantes pour poser un premier diagnostic dans ce domaine. Que je sois ce que l'on appelle communément une "micro-influenceuse" et non une star de l'influence, ne change rien et n'enlève rien à cette légitimité.


Troisièmement, cette plateforme éditoriale est la mienne. Je suis donc libre d' y partager ce qui me tient à coeur, libre d'y défendre mes valeurs et mes convictions. Les seules limites que je m'impose sont la loi et le respect d'autrui.


Par conséquent, je crois sincèrement en ma légitimité et en la plus-value que peut apporter cet article à ses lecteurs: il se veut en effet aussi complet, rigoureux et constructif que possible. Néanmoins, il ne s'agit pas d'une thèse. Vous comprendrez donc qu'il laisse encore la place à de multiples développements.


Ces limites étant fixées, permettez-moi donc maintenant de partager avec vous mon point de vue. Sans naïveté. Sans hypocrisie. Avec enthousiasme. Avec l'idéal qui m'anime et que j'assume pleinement.



Qu'est ce qu'un blogueur de voyage? Pourquoi devient-on blogueur de voyage? Comment peut-on gagner sa vie en tant qu'influenceur/blogueur?

Blogueur de voyage : un métier exigeant, captivant et multi-facette


Le métier de blogueur de voyage fait rêver certains et en fait sourire d'autres. Mais qu'en est-il vraiment? Quel est son rôle, sa mission, son quotidien? Je vous dévoile ici les coulisses d'une profession pas comme les autres.



1. Pourquoi devient-on blogueur de voyage


  • Par passion, avant tout

Le blogueur de voyage est, en principe,  un passionné de découvertes, dont la passion frôle souvent l'addiction. Ce besoin de découvrir l'ailleurs est viscéral, profondément intime; il coule dans ses veines jusqu'à l'overdose. (J'en profite pour remercier mon mari, mes enfants et nos amis proches, qui ont l'intelligence de me laisser vivre cette passion, la gentillesse de me laisser exprimer mon enthousiasme - débordant parfois - et de m'indiquer quand les symptômes pathologiques apparaissent ...)


Mais cette passion, c'est aussi un booster de dopamine, un générateur de bonheur. Chaque voyage bien choisi est un enrichissement personnel, émotionnel et intellectuel. Chaque rencontre avec l'autre, humain ou non humain, engendre une remise en question positive, une métamorphose constructive. Pour le vrai passionné, le voyage a un sens, que celui-ci soit conscient ou non.



  • Parce qu'on aime donner

Fondamentalement, un passionné de voyages devient blogueur parce qu'il souhaite rendre service aux autres, partager son expérience pour inspirer leurs rêves et les aider à réaliser leurs propres projets. Qu'il soit réservé ou plus sociable, un blogueur de voyage est en principe altruiste.


Si certains semblent avoir malheureusement oublié que la flamme qui les animait était loin de l'image égocentrique qu'ils exposent le succès aidant, force est de constater que la grande majorité des blogueurs de voyage a toujours le feu sacré et le coeur à fleur de peau.



  • Parce qu'on aime créer du contenu relatif au voyage ... sur la longueur

Un blog voyage représente un important contenu créatif, qu'il s'agisse de web design, de récits ou guides de voyage, de photographies, de vidéos, etc... Il faut savoir tenir sur la longueur et ne pas baisser les bras face à l'ampleur du travail. Car du travail, il y en a.



La création d'un contenu multiple: une des forces des blogueurs de voyage


2. Qu'est-ce qu'un blogueur de voyage

 

Comment imaginez-vous le quotidien d'un blogueur? Comme quelqu'un de toujours en vacances, pas vrai? Qui plus est, quelqu'un qui bénéficie continuellement de vacances gratuites! Le rêve, n'est-ce pas?


Au risque de vous décevoir et de briser définitivement cette vision "Pub pour Euro millions" véhiculée par les réseaux sociaux, la société et, il faut bien l'admettre, par certains blogueurs, la réalité est loin d'être aussi simpliste. Elle est en outre, totalement fausse.



  • Un nouveau professionnel des médias et du tourisme

Un blogueur de voyage est un auteur de récits ou de guides de voyages numériques, de revues d'hôtels ou de critiques gastronomiques; il réalise lui-même ses reportages photo/vidéo. Il est le propriétaire de son propre canal de distribution, son propre éditeur et réalise dès lors lui-même la promotion de ses textes et de sa production artistique, tant par référencement naturel qu'au travers des réseaux sociaux.


Par conséquent, cette nouvelle forme de communication virtuelle se distingue e.a. des médias traditionnels par le fait que l'auteur est maître de sa ligne éditoriale - en principe très personnelle - , par le système d'auto-promotion des articles et par l'échange direct entre l'auteur et ses lecteurs.


À l'heure actuelle, il n'existe encore aucun numéro de nomenclature correspondant à cette profession au code NACE (Nomenclature statistique des Activités économiques dans la Communauté Européenne), ni d'association francophone professionnelle officielle représentant légalement les blogueurs.


Cependant, compte tenu des exigences intellectuelles, sociales et techniques liées à l'exercice de cette activité, compte tenu également de son rôle croissant dans le développement du tourisme, le blogging de voyage doit être envisagé comme un véritable métier.


  • Un professionnel aux compétences multiples

Le blogueur de voyage d'aujourd'hui, même s 'il se définit comme amateur, se situe bien loin de l'image complètement dépassée de l'étudiant partageant ses émotions avec sa famille ou ses amis, sur un blog dont le nom de domaine ne lui appartenait pas, à l'ergonomie peu réfléchie et à l'esthétique limitée.


En 2019, le blogueur de voyage est devenu une référence pour un lectorat qui lui fait confiance et un partenaire incontournable des destinations touristiques. À ce titre et compte tenu de l'évolution de la société et des techniques, il doit répondre à de nombreuses exigences et posséder de multiples compétences.


Ainsi, s'il veut se distinguer, il doit disposer de connaissances non négligeables en web design, en rédaction web, en rédaction pure, en photographie et vidéo; il doit également avoir un minimum de connaissances entrepreneuriales , en communication et marketing, de même qu'en gestion des réseaux sociaux (Community management).  


Force est de constater que la plupart des blogueurs ont suivi des études supérieures et nombreux sont ceux qui ont un background universitaire. Mais ceci ne suffit pas, loin de là, et la formation continue est absolument indispensable.



  • Un métier pour lequel il n'existe aucune formation homologuée

Il n'existe actuellement pas de formation homologuée et complète. La formation se réalise principalement par l'expérience, le partage entre blogueurs - lors de salons ou virtuellement - et des formations parcellaires organisées par des entreprises ou écoles spécialisées (référencement, photo, etc...).




  • Un métier nécessitant des investissements financiers non négligeables

Gérer un blog voyage professionnel engendre un certain nombre de coûts et requiert des investissements en matériel importants : achat d'un nom de domaine, hébergement du site, applications diverses agrémentant le parcours de l'utilisateur, suivi analytique, logiciel d'édition de photos et de vidéos, matériel informatique suffisamment puissant que pour permettre la réalisation, la gestion et le partage du contenu créatif, smartphone, matériel photographique, caméra(s), voire drone, etc...


À cela s'ajoute encore les frais de formation, les voyages et frais de séjour qui ne seraient pas pris en charge par les destinations. S'il veut rester crédible, ne vaut-il d'ailleurs pas mieux qu'il conserve un pourcentage de voyages réalisés incognito, sur fonds propres? 



  • Un métier chronophage et requérant beaucoup de persévérance

Toute personne exerçant cette activité sérieusement (et son entourage!) peut en témoigner: gérer un blog est extrêmement chronophage. Et si comme moi, vous exercez une autre profession full time, attendez-vous à passer vos soirées - parfois des nuits, en période de rush - , vos week-ends et vos vacances, la plupart de vos loisirs, à travailler. Il faut  avoir la santé ou une volonté énorme.


Je ne sais si on embrasse cette profession ou si c'est elle qui nous choisit mais après maintenant un peu plus de deux ans d'activité, je suis certaine qu'elle exige énormément de passion et de persévérance, face aux obstacles de toutes sortes qui, inévitablement, jalonnent le parcours.



  • Comment un blogueur peut-il gagner sa vie?

S'il est bien une question fréquemment posée, c'est celle-ci. Et au risque de décevoir ici encore, on est bien loin de la cagnotte de l'Euro million. Si aux États-Unis, certains blogueurs de voyage ont réussi à créer un véritable empire, en Europe, rares sont ceux qui réussissent à vivre de leur passion.


Les revenus d'un blogueur proviennent potentiellement des sources suivantes :

- liens d'affiliation;

- promotion de produits et services sur les réseaux sociaux et/ou sur le blog;

- vente de photos, vidéos ou tout autre produit lié au voyage;

- réalisation de contenu créatif pour une destination, pendant et à l'issue d'un voyage de presse/blog trip;

- publicité sur le blog;

- formation sur le web;

- consultance;

- ...



Comment un blogueur de voyage peut-il gagner sa vie? Comment gagner de l'argent avec un blog de voyage?


3. Les voyages de presse, blog trips et autres vacances de rêve


Lorsqu'un office de tourisme, un hôtel ou un autre opérateur de tourisme, voire une marque, estime qu'un blogueur répond à certaines exigences - je parlerai de ce sujet plus loin -, il peut l'inviter à un voyage de presse ou un blog trip.


Un voyage de presse, auparavant réservé aux seuls journalistes professionnels, est un voyage de groupe, au cours duquel des blogueurs et des journalistes découvrent une destination ou des installations destinées aux touristes. Un blog trip est un type de voyage de presse réservé aux blogueurs/influenceurs. Certains voyages de presse peuvent cependant s'effectuer sur base individuelle. 


Il va de soi que l'hôte attend expressément un retour positif de ses invités, qu'il va naturellement choyer pendant leur séjour. Si je m'appuie sur ma petite expérience personnelle en la matière, les hôtes ne ménagent pas leurs efforts pour que tout se déroule au mieux. Est-ce bien? Est-ce mal? Je vous donne mon opinion ci-après et vous laisse vous forger la vôtre.


Mais avant cela, parlons des vacances de rêve ...



  • Un voyage de groupe organisé

Est-ce le rêve? Et bien non! Même si j'adore réellement - et très sincèrement - rencontrer de nouvelles personnes, dans mes rêves, mes compagnons de voyage ne sont pas des inconnus. Un voyage de presse requiert donc de faire des efforts : dans ce contexte, le blogueur est en effet en représentation constante. Ce côté relations publiques peut dès lors ne pas convenir à tout le monde. Il faut être sociable et savoir s'adapter.



  • Un programme souvent chargé

Compte tenu du temps généralement réduit pour découvrir la destination, les visites se succèdent rapidement et peu de place est laissée à l'improvisation - donc au temps libre.


A cela, il convient d'ajouter la nécessité de rester présent sur les réseaux sociaux, de gérer ses mails, de prendre des photos et vidéos, pour ensuite les éditer et en utiliser certaines pour des publications, le soir, sur les réseaux. La journée et la soirée sont passées que vous n'avez pas eu le temps de respirer ou à peine.



  • Des vacances gratuites

Selon le cnrtl, gratuit signifie "Qui est fait, donné ou dont on peut profiter sans contrepartie pécuniaire (...) sans (...) aucune compensation."


Comment? Un article à livrer? Ah, mince! En effet, s'il n'y a parfois aucun contrat écrit, il existe cependant un accord tacite et moral de rédiger un article si l'expérience est positive.

Le temps de rédaction dépend bien sûr de la longueur et de la qualité de l'écrit, mais aussi du nombre de photos/vidéos incluses dans celui-ci et de toute la campagne sociale à réaliser pour promouvoir cet article.


Et si cet article est long, documenté, accompagné de photos ou de vidéos, il ne se termine pas en 2 ou 3 heures. Comptez en semaines!


Dans une interview qu'il a accordée à Fred Marie de Photographe Stratège , Xavier Berthier, fondateur et organisateur du Salon des Blogueurs, déclare d'ailleurs qu'un blogueur qui gagne sa vie grâce à son blog, c'est parce qu'il travaille énormément; selon lui, pour "3 à 5 jours sur une destination, c'est 3 semaines (...) de boulot de dingue".


J'ajouterais qu'il n'y pas que les "Happy few" : avant d'être reconnus et appréciés, bien d'autres blogueurs ne comptent pas leurs heures! Vous avez dit "gratuit"?



Ne manquez pas la suite de ce dossier !


Lire le deuxième volet : Les vérités qui dérangent.





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